Les Mères lyonnaises

On appelait mères lyonnaises celles qui cuisinaient pour les familles bourgeoises de la région mais qui ouvrirent leurs propres restaurants suite à leur émancipation. Elles étaient connues pour travailler les bas morceaux, un moyen de ne rien jeter et d’en faire des plats raffinés.

XVIIIe siècle 

L’Émergence d’Artisanes Culinaires Exceptionnelles

Au XVIIIe siècle, Lyon vit l’émergence de femmes exceptionnelles, les « Mères Lyonnaises », autrefois cuisinières au service des familles bourgeoises. Leur ingéniosité culinaire transparaissait dans leur capacité à sublimer les bas morceaux, transformant les ingrédients les plus simples en mets exquis. L’élan vers l’émancipation les conduisit à ouvrir leurs propres restaurants. Parmi elles, des figures telles que la Mère Brigousse à Charpennes et la Mère Guy vers la Mulatière en 1759 illuminèrent la scène gastronomique lyonnaise.

L’Entre-Deux-Guerres

Période de Métamorphose Culinaire

L’entre-deux-guerres fut une époque de bouleversements économiques, obligeant les familles aisées à se séparer de leurs cuisinières. Face à cette adversité, ces femmes se libérèrent et ouvrirent leurs établissements. Les « Mères Lyonnaises » devinrent les symboles incontestés de la gastronomie locale, préconisant une cuisine ancrée dans les produits du terroir.

L’Élégance Sublimant la Rusticité

Initialement perçue comme une cuisine rustique et conviviale, celle des « Mères Lyonnaises » évolua vers la grâce et la finesse. Leurs restaurants devinrent des lieux de convergence, attirant une clientèle variée : ouvriers, bourgeois, grands industriels. Tous convergèrent pour déguster des plats traditionnels dans une ambiance conviviale. Ces mets, autrefois modestes, revêtirent désormais une aura gastronomique.

Un Héritage Culinaire Intemporel

Les recettes, transmises de génération en génération, devinrent emblématiques, hissant des plats modestes au rang de délices appréciés des fins palais. La quenelle, le tablier de sapeur et bien d’autres se taillèrent une place de choix sur ces tables où se mêlaient excellence culinaire et chaleur humaine.

La Mère Vittet

Originaire de l’Isère, Alice Vittet s’est installée à Lyon après la Grande Guerre. Elle a débuté chez un fromager avant d’ouvrir des boutiques avec son mari Henry. En 1945, ils ont déménagé pour gérer le Café du Marché, rue de la Bourse. Après le décès de son mari, elle a acquis un établissement au 26 cours de Verdun en 1957, transformant l’endroit en une brasserie très fréquentée, ouverte en continu. Plus tard, son fils Jean a rebaptisé ce lieu en « La Mère Vittet » en 1981.

La Mère Brazier 

Eugénie Brazier est sans doute l’une des « Mères Lyonnaises » les plus célèbres. Elle a été la première femme à obtenir trois étoiles au guide Michelin pour deux restaurants différents, exploit remarquable dans le monde de la gastronomie. Elle a dirigé le restaurant La Mère Brazier, où elle a excellé dans la préparation de plats emblématiques de la cuisine lyonnaise, comme la poularde de Bresse demi-deuil et les quenelles de brochet.

La Mère Guy

La Mère Guy, dont le vrai nom était Marie-Antoinette Guy, est une autre grande figure des « Mères Lyonnaises ». Elle a ouvert son restaurant en 1759 et est connue pour avoir fait découvrir aux Lyonnais des plats traditionnels, notamment la tête de veau, le tablier de sapeur et les quenelles.

La Mère Bizolon

Clotilde Bizolon, surnommée affectueusement « la Maman des Poilus », était une des mères lyonnaises les plus vénérées de son époque. Durant la Première Guerre mondiale, elle offrait des repas gratuits aux soldats revenant à la gare de Lyon Perrache, une initiative qui réconfortait les combattants après la perte de son mari et de son fils au début du conflit.

Épaulée par des amis, elle ouvrit une buvette improvisée en plein air pour servir du vin et du café aux soldats revenant des tranchées. Grâce au soutien des Lyonnais et du maire Édouard Herriot, cette buvette fut rapidement transformée en un établissement pérenne. Après la guerre, elle travailla dans un bouchon, mais dut rouvrir sa buvette lors du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale.

Sa contribution fut honorée par la Légion d’Honneur en 1925. Aujourd’hui, une rue porte son nom dans le deuxième arrondissement de Lyon, témoignage de la reconnaissance de son dévouement et de sa générosité envers les soldats et la communauté lyonnaise.

La Mère Fillioux

Marie Fillioux, surnommée « La Mère Fillioux », était une autre cuisinière renommée de Lyon. Elle a dirigé un restaurant où elle préparait des plats traditionnels, notamment la fameuse quenelle et d’autres spécialités régionales appréciées des habitants et des visiteurs de la ville.

Elle a été le mentor d’Eugénie Brazier, partageant même la recette de ses fonds d’artichauts au foie gras avec cette dernière. Le restaurant La Belle Époque, où elle officiait, a été détruit après la guerre, mais une plaque commémorative rappelle son emplacement d’origine au 73 rue Duquesne.

La Mère Richard

Renée Richard (1930-2014) a marqué les Halles de Lyon en étant une commerçante emblématique. Elle détenait le monopole de la vente à Lyon des petits fromages de chèvre, devenus prisés chez des chefs éminents tels que Georges Blanc à Vonnas, Gérard Nandron à Lyon, Fauvin à Romanèche-Thorins et également chez l’illustre Monsieur Paul à Collonges-au-Mont-d’Or. Surnommée affectueusement « La Mère Richard » par Paul Bocuse, elle fut consacrée par ce dernier, le premier chef à mentionner sur sa carte le nom de la créatrice des Saint-Marcellin parfaitement affinés, des fromages du Mâconnais, du Vacherin, du Morbier, du Laguiole, du Salers, des Saint-Nectaire fermiers, du Comté légendaire et du Beaufort d’alpage.

Pionnière, Renée Richard fut la première à apposer son nom sur les emballages de ses fromages, contribuant ainsi à promouvoir l’excellence des produits de la région Rhône-Alpes.

La Mère Léa

Léa Bidaut (17 mai 1908 – 30 mai 1996), connue sous le nom de Mère Léa, était une cuisinière française et une Mère lyonnaise. Représentante renommée de la cuisine lyonnaise, elle a débuté sa carrière en 1927 en travaillant pendant son adolescence pour des personnes fortunées dans sa ville natale, comme la famille industrielle Schneider, avant de déménager à Lyon. À partir de 1938, Bidaut a dirigé son premier restaurant, plus tard connu sous le nom de « Daniel et Denise », rue Tupine, Place Bellecour à Lyon, pendant quatre ans. En 1943, elle a ouvert son restaurant « La Voûte chez Léa » à proximité, qui a décroché une étoile dans le Guide Michelin.

Elle était connue pour parcourir les étals du marché Saint-Antoine sur le quai à côté de son restaurant, poussant son chariot arborant une pancarte disant « Attention, faible femme mais forte gueule ». Elle terminait ses tours du marché sans dépenser presque d’argent, et elle réalisait des merveilles avec très peu, notamment avec ses pointes d’asperges.

Elle a rejoint les Toques Blanches Lyonnaises en 1978. Le restaurant a été repris en janvier 1980 par le chef Philippe Rabatel, et elle a pris sa retraite en 1981. En 2013, le restaurant a été vendu à Christian Morel, au chef étoilé Michelin Christian Têtedoie et à la sommelière Laurence Ginet. En 2022, le restaurant est toujours en activité.

Pionnière, Renée Richard fut la première à apposer son nom sur les emballages de ses fromages, contribuant ainsi à promouvoir l’excellence des produits de la région Rhône-Alpes.

Ces femmes talentueuses ont laissé un héritage durable dans le monde de la gastronomie lyonnaise et sont toujours célébrées pour leur contribution à la préservation et à la popularisation des plats traditionnels de la région.

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Pierre Bossan

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